En RDC, les services de santé organisent régulièrement, au courant d’une année civile, plusieurs campagnes de vaccination contre la poliomyélite (polio virus sauvage). Ce qui relève des questions : qui sont concernés par la vaccination contre la polio ? Une personne doit prendre combien de doses pour s’immuniser contre cette maladie handicapante ?
C’est quoi la polio ?
Le poliovirus est un virus qui envahit le système nerveux. Il peut entraîner des paralysies irréversibles en quelques secondes. Cette maladie est la poliomyélite. Elle est très contagieuse. Elle touche principalement les enfants de moins de cinq ans. La moitié des cas infectés en meurt.
Des études remontent sa présence à plus de 3 400 ans avant Jésus-Christ, c’est en 1840 qu’un médecin orthopédiste allemand, Jacob Heine, s’intéressa officiellement, le premier, à la poliomyélite.
Elle touchait autour de 600 000 enfants par an dans le monde au 20e siècle. Cette maladie peut être prévenue depuis les années 1960 par un vaccin, sinon des vaccins. Aujourd’hui, on ne dénombre plus que quelques centaines de cas dans le monde. Vu sa virulence, son degré de propagation, l’apparition d’un seul cas déclenche le protocole épidémiologique.
Mieux, tout est fait par les services sanitaires pour prévenir l’apparition des cas. Ce qui justifie la programmation régulière des campagnes de vaccination dans les pays à risques, ayant des cas, dans les régions où les cas peuvent surgir vue les conditions hygiéniques en déca de l’acceptable.
Les mains sales ou la bouche sale?
En effet, la polio serait classée parmi les maladies dites des mains sales car elle pénètre dans l’organisme par la bouche pour se loger dans les ganglions lymphatiques cervicaux ou mésentériques (de l’intestin grêle).
Dans 1 à 2%, le virus atteint les névromes moteurs du système nerveux entraînant leurs destructions irréversibles.
Vu qu’elle n’entre que par la bouche, elle se transmet d’une personne malade à une personne saine lorsque cette dernière a été en contact avec les déjections fécales d’une personne atteinte par l’intermédiaire d’aliments ou eaux souillées. Une personne malade peut transmettre durant 1 à 6 semaines.
Assainissement et vaccins
Le traitement de cette maladie se limite au traitement symptomatique. Ainsi la prévention est la meilleure voie recommandée. Elle est de deux manières : la première consiste à mettre en place un assainissement durable du milieu de vie, un village, un quartier, une ville assainie. La seconde est la vaccination. Il en existe deux principaux qui sont préventifs :
1. Le vaccin poliomyélitique injectable (VPI) : exigeant plusieurs injections pour des raisons de rappel, il faut se rassurer des conditions d’hygiènes strictes. Très sûr mais avec un coût de production élevé associé à une logistique lourde. Ce qui fait qu’à ce vaccin développé par Jonas Salk on préfère le VPO de Albert Sabin.
2. Le Vaccin poliomyélitique Oral (VPO). Développé également dans les années 1950, le VPO contient des poliovirus vivants mais atténués par les mutations. Les personnes vaccinées sont ainsi contaminées par des souches modifiées de manière à ce qu’elles ne puissent infecter le système nerveux central. Ce vaccin est celui préféré dans les programmes de vaccination préventive car il est facile à administrer, à déplacer et coûte relativement moins que le précédent.
Administration du vaccin
Pour l’immunité d’un enfant il faut 4 doses à 4 semaines d’intervalles environ. A la naissance puis à l’âge de 6 semaines, 10 semaines et 14 semaines. La quatrième dose est suivie d’une dose de vaccin anti poliomyélite inactivée (VPI).
Ces 4 doses c’est pour une zone endémique ou à risque d’importation de poliovirus. Pour les autres zones, 3 doses suffisent et la dernière est associée à la dose de vaccin anti poliomyélite inactivée. Généralement 4 doses sont données.
Et Docteur Mundama Sénior précise : ” 3 doses à intervalle de 4 semaines avant l’âge de 3 mois suivi d’une dose additionnelle entre 16 et 23 mois d’âge; puis une dose de rappel avant l’âge de 6 ans puis tous les 5 ans jusqu’à l’âge de 26 ans et 1 fois tous les 10 ans jusqu’à l’âge de 65 ans tant que la maladie n’est pas éradiquée sur terre comme la variole et la syphilis non vénitienne.”
Ceci est le calendrier de l’OMS, mais chaque pays l’adapte en fonction de ses capacités logistiques en chaîne de froid et aussi des compétences des prestataires bien formés en la matière ajoute Dr Mundama Sénior.
“Normalement c’est 4 doses mais pour des besoins de riposte , il y a des doses sans fin…
Cela nous créée des incompréhensions terribles dans la communauté. Des vaccins sans dose ….
Dans notre calendrier vaccinal il y a 3 doses de VPO et une dose de VPI que l’enfant reçoit pour conjurer la poliomyélite. Malheureusement, dans plusieurs coins du pays certains parents ne prennent pas au sérieux ce calendrier; d’où une notification ci et là de quelques cas de polio. Or il suffit d’un seul cas pour organiser une riposte nationale. Et cette riposte concerne aussi bien les enfants respectant ce calendrier que ceux ne le respectant pas. Même les enfants complètement vaccinés. c’est dans ce dernier cas que nous éprouvons souvent du mal à convaincre les parents.“, explique un médecin traitant en milieu rural en territoire de Beni.
La campagne à Butembo
A Butembo (Nord-Kivu, RDC) il y a eu lancement des activités de la 4ème phase de la campagne de vaccination contre la poliomyélite ce mercredi 4 décembre 2024. Les activités y relatives se sont déroulées dans l’aire de santé de Makasi devant les installations de l’hôtel Believe sur le boulevard Joseph Kabila.
Selon les statistiques livrées par les autorités sanitaires de la Division Provinciale de la Santé, antenne de Butembo, près de 982 143 enfants sont attendus à vaccination. Les vaccinateurs useront de la stratégie de porte à porte afin d’atteindre le maximum d’enfants possible compris entre 0 et 59 mois.
Pour docteur Bernardin Siviholya, responsable du programme élargi de vaccination dans la DPS Butembo, cette activité va se dérouler dans un délai de trois jours, c’est-à-dire du 5 au 7 décembre 2024.
Il ajoute que deux autres jours seront réservés pour récupérer des enfants qui ont du retard dans leur calendrier de vaccination.
« Pour l’ensemble de l’antenne de Butembo, nous attendons une cible de 982 143 enfants dans 17 zones de santé, et 333 aires de santé dans la partie Nord de la province. En ville de Butembo, nous attendons 280 760 enfants et dans la ville de Beni 116 514 enfants. Ce sont des enfants de zéro à 59 mois, soit les enfants qui n’ont pas encore eu 5 ans. »
A cette occasion du lancement de la campagne, deux victimes de la poliomyélite ont partagé leurs témoignages en vue de sensibiliser les parents à bien accueillir les vaccinateurs pour que leurs enfants reçoivent leurs doses. Pour eux, priver son enfant du vaccin c’est lui privé de la vie.
« J’étais un enfant normal mais à l’âge de 3 ans mes membres ont commencé à s’affaiblir. J’ai été atteint par la polio, mes parents ont essayé de me soigner, ça n’a pas tenue voilà que je suis par terre alors que le vaccin est gratuit », témoigne un handicapé de la polio.
En RDC la vaccination contre la polio concerne 23 millions d’enfants sur une population estimée à plus de 100 millions.
24 cas de poliomyélite ont été enregistrés depuis le début de l’année 2024 en République démocratique du Congo, a annoncé lundi 02 décembre 2024 à Kinshasa le ministre de la Santé publique, lors du lancement officiel des Journées nationales de vaccination contre la poliomyélite.
“La RDC est passée de plus de 500 enfants paralysés en 2022, à moins de 250 cas de paralysie en 2024 ; bien que deux cas de poliovirus sauvages aient été détectés dans le pays en 2024 (un à Kinshasa et l’autre dans la Tshopo)” écrit radio Okapi.
Hervé Mukulu